Nul ne doit mourir en vain

Le beau spectacle
L’Effondrement programmé
Le voilà
Il a mis sa couronne de deuil
Son voile de cauchemar
Il monte un cheval noir
D’où vient-il ce triste sire
Ce déchet de nos accomplissements
Enterrant sur son passage
Des multitudes
Des innocent.es

La grandiloquence
L’Homme si grand H
Evertué de munificence
Un être microscopique
Sans état d’âme
Sans pitié ni compassion
Vient mettre à genoux ta prétention
 
Des barrages
Coupant l’eau des peuples
Des centrales
Irradiées de cailloux
Des mines
Abreuvées de sueur et de sang
Des usines
A dos d’hommes et de femmes
Des laboratoires
Expérimentant les extinctions d’espèces
 
Ils sont morts
Pour l’ambition des puissants
Elles sont mortes
Pour leurs projets d’avenir
Que reste-t-il à ces familles déshéritées
Des cendres au fond des fosses communes
Et l’empathie du présentateur télé
 
Et nous, pauvres survivants
Assistants bénévoles
Révoltés confinés
Secouristes sacrifiés
Damnés guérisseurs
Alerteur.es de toujours
Vrais protecteurs
Voici notre colère
 
Le plan
Ce bout de parchemin virtuel
Sur lequel nos vies s’effacent
Au profit du profit
 
Le contrat
Où s’affairent des adhésions truquées
Obligées de signer
Sans contrepartie
 
L’appartenance
De son corps à la science
De son être à la Nation
De son cerveau à la propagande d’Etat
 
La culture
Des dominants vers les dominés
Forcés de se taire
Et de créer sous terre
 
La vie
Au fond du silo mortuaire
Au trente-sixième dessous
Dans les allées de l’attente
 
Le fléau
L’intime récompense
La sublime réponse
Un héros incompris et cruel
 
Quelle pitié 
Aucune
Pas plus qu’un gouvernant
Sur son gouverné
 
Tu n’es pas mort pour rien
Mon ami
Je continuerai l’œuvre de ruine
J’écroulerai le dessein de tes meurtriers
Je détruirai ses temples financiers
Je raserai ses palais
Et les balcons de sa suffisance
 
Tu n’es pas morte pour rien
Mon amie
Quel que soit ton pays
Des êtres paieront
Des êtres de chair
Comme tu l’étais
Pour t’avoir tuée
Toi et tes enfants
 
Les montagnes se réveillent
Les océans regorgent d’animaux
La nature verdit
Les prés de mon enfance refleurissent
L’air augmente
Et nous sommes en prison
 
Regarde tous ces fous
La clé sur le démarreur
Prêts à charger une foule de produits
Dans le coffre de leur automobile
Je voudrais que tout continue à s’arrêter
Que s’évaporent par centaines
Les promoteurs du miracle satanique
Au pied de leur encensoir
Vaincu par la honte, la bêtise
Ou par la main de spectres vengeurs
 
Je ris de la situation
Debout sur un mur
Comme le coq de la fable
Moqueur et sage à la fois
Je ris de vos malheurs
Je ne souhaite que votre perte
Et votre solitude
 
Je vous parle
À vous
Marchés couverts
Cellules de crises
Vitrines privées
Pôles de décision
Zones V.I.P.
Abjectes inventions murées
 
Je vous vois
Défait du matin sanglant
La gorge malsaine
Les yeux de marbre
Et je crache sur vos espoirs du soir
 
Encore des rires
De la joie et des danses
Sur le cercueil de ta société passée
Vous ne serez pas morts pour rien
Nous finirons le travail
À coups de boule
À coups de crosse ou de fusil
À coups de vengeance
 
L’amour n’est plus
Une distance s’en est emparée
Ils avaient tout prévu
Médité et programmé
Ils copulent en secret
Dans des tours de verre pilé
Arrosés d’eau de javel
Et oppriment de père en fils
Ceux que vous chérissez
 
De prières en sacrifices
Nous mettrons fin à l’ordre odieux
Vous ne mourrez pas en vain
Vous qui souffrez
Sur un lit d’hôpital
Pour toute récompense
A vos décennies de vie
Et d’espérance
En un monde meilleur
 
Il sera meilleur
Je vous le dis
Comme un serment à la partie
Qui va se jouer
Se jouer bientôt
Les armes à la ceinture
L’intelligence dans les actes
 
Nous jetterons la base et la cime
A tous les vents de la colère
Reviendront au printemps
Le cri des oiseaux terrestres
Et les courants marins
Porteurs de perspectives
Modèleront l’à venir
 
Pour ça
Mes ami.es
Nous ne les laisseront pas
Reconstruire l’injustice
Ni contrôler l’Alpha
Et moins encore nos Omega
 
En route vers les rives infinies
Je rame sous un soleil furieux
Je suis le peuple de la terre
Engagé contre le mensonge et l’infamie
Je ne veux plus de ce système intransigeant
Je refuse ce mélange d’huile et d’eau
Où fondent les désirs des démunis
En l’or des prédateurs
 
Il.les ne doivent mourir en vain

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Illustrations : Warner Bros. Pictures – INCEPTION de Christopher Nolan

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