20 janvier 2024

Alia KASSAB sur WANN

Une jeune écrivaine cherche un sens à la vie quand autour d’elle des bombes stigmatisent de nouveau GAZA

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Réflexions sur la guerre

Bande de GAZA, mai 2023

Ils nous bombardent mais je n’ai pas peur. Je suis trop en colère pour me préoccuper des bombes. Je ne ressens aucun effroi. Que serais-je sans ma rage ? Sans ma peine, que me resterait-il ? Je suis terriblement frustrée, mais je conserve ma foi envers le monde. Je me demande si les gens savent à quel point nous sommes désespérés.

J’ai toujours une chanson à l’esprit. C’est un enfant qui tient une carte sans montrer la moindre émotion. Mes yeux regardent le monde avec le sentiment d’avoir failli. J’avais envie de voyager, je pensais rencontrer toutes sortes de peuples. Maintenant, je ne désire rien. Je veux juste que ma vie cesse paisiblement.

L’être humain est cruel, ne fait aucune concession. Il n’apporte que la misère. Ne vois-je que les ténèbres ? Je sais qu’il y a des causes qui méritent qu’on vive et se batte pour elles, mais répéter sempiternellement les mêmes slogans ne sert à rien. Plus j’essaye de comprendre l’humanité, plus je me pose des questions. Et si on effaçait tout ? Je compare la rage d’EREN à la mienne. En découvrant la vérité sur le monde, incapable de l’accepter il décida de le détruire.

Ma voix a besoin d’avoir confiance en elle. Raison et défaitisme sont face à face, et je dois les accepter tous les deux.

Je n’ai pas suffisamment étudié la psychologie pour comprendre la cruauté. Je sais qu’Allah nous a façonnés avec des différences, que nous partageons tous l’expérience de la vie, que nous avons les mêmes sentiments, et que nous faisons les mêmes rêves.

J’espère rencontrer Allah et tout lui dire. Je sais qu’il a la clé, bien que parfois je m’interroge sur ses raisons. Pourquoi ne déciderais-je pas de quitter la partie ? Il m’est impossible d’adhérer à la manière dont Allah a créé ce monde. En guise de résistance, la seule chose en mon pouvoir est de ne pas avoir d’enfant. Même si mon instinct me supplie de devenir mère, je le combats. Donner naissance à un enfant dans ce monde est un acte égoïste.

Peut-être freiner la natalité est-il la solution. En éradiquant notre espèce si toxique, nous éviterions les conflits générationnels. Nous pourrions considérer cela comme un meurtre dicté par la compassion. Ma vie est un dilemme et je peux clairement identifier mes contradictions. Je me demande : est-il possible d’être à la fois courageux et lâche ?

Il n’y a pas plus grand espoir que de mettre au monde une vie nouvelle. Oser, sans cesse, recommencer, même en ayant connaissance des épreuves, est certainement l’engagement le plus fort. Allah teste-t-il notre libre arbitre et notre instinct ? Dans mes prières, je suis debout face à Lui et je lui demande : « Pourquoi ? ». J’ai à l’esprit un ver du Coran, très doux, très calme.

Ô Muhammad, dis leur : « Si les eaux de l’océan se changeaient en une encre capable d’écrire les Mots de mon Seigneur, il n’en aurait jamais assez pour écrire les Mots de mon Seigneur. » (La caverne : 18 ; 106).

Je n’ai pas peur

Je forge quand même un espoir, et je n’ai pas peur. Je relève le défi. Allah a les réponses et les mots.

Ils disent : « La vie est un cadeau ». Je veux bien y croire mais parfois mon esprit me trahit. J’avance, certes, mais très mal. Il m’arrive de me réveiller forte. Je parle de ce que je vois, je ne souhaite pas devenir une héroïne ou un monstre, je veux me sentir humaine.

J’ignore si la Palestine sera libérée un jour. Le sang continuera de couler, j’en suis sûre, bien que ce soit injustifiable. Un tel sacrifice est-il nécessaire ? Faut-il que quelqu’un soit abandonné ? Mon dernier acte d’amour, c’était d’éteindre mes pensées et d’être dans la sensation pure. Je dédicace ma vie à la sagesse et à la compréhension de ce pourquoi nous sommes en vie. Ce pourrait être mon unique raison de vivre. Je veux découvrir la beauté derrière le voile de la souffrance et comment les roses s’épanouissent dans le sang ou l’amour. J’ai besoin de la sagesse d’Allah. Je veux croire à une humanité moins vengeresse.

Je veux avoir des enfants de l’amour, sans résistance.

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Eren Jäger (le chasseur) est un personnage de fiction et le héros du manga « Attaque sur Titan » créé par Hajime ISAYAMA.

Liens :

Alia Kassab sur Mondoweiss « Du sang naissent les roses »

Alia Kassab et WANN We Are Not Numbers

Réflexions sur la guerre est traduit de l’anglais en français par Michel Pommier.

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